Memoria (Original Mois Benarroch)

Si la poesía es memoria
¿Qué es el recuerdo?
¿Y dónde están tus ojos
hermano
que recuerdo
tan marrones?
¿Dónde la mirada
de nuestras faltas
idioteces
ideas preconcebidas
y muertes inútiles?

Yo escribo para no olvidar
sobre todo
para no olvidar
lo que no recuerdo.

El primer Benarroch en Tetuán

Cuentan que el primer Benarroch de Tetuán
llego de Fez
con su hermano
que murió en el camino
y el lo llevó en su espalda hasta llegar
para que fuese enterrado como se entierra a un judío.

Y yo llevo a mi hermano sobre mi espalda
aunque murió al fin del camino
llevo a mi hermano
como el que guarda un viejo vino.

Tengo un largo cuento que contar
y no es el mío
es el de mis muertos
que me miran como un pino.

Mémoire (Version française Sonia Soriano et Rosa Ramos)

Si la poésie est mémoire
Qu’est-ce que le souvenir?
Et ou sont tes yeux
mon frère, ceux que mon souvenir
remémore si bruns?
Ou est ton regard sur nos fautes,
idioties,
idées préconçues
et morts inutiles?
J’écris pour ne pas oublier
sur tout
pour ne pas oublier
ce que ne me reviens pas.

Le premier Benarroch à Tétouan

On raconte que le premier Benarroch à Tétouan
arrivait de Fez
avec son frère qui était mort en route
et qu’il a porté sur son dos jusqu’à
leur arrivé pour qu’il soit enterré
comme l’on enterre un juif.

Et moi je porte mon frère sur mon dos
même qu’il soit mort en route
je porte mon frère
comme celui qui préserve un vieux vin.

J’ai une longue histoire à raconter
et ce n’est pas la mienne
c’est celle de mes morts
qui me regardent comme un pin.

El dolor (Original Mois Benarroch)

El dolor viene a ponerse en las rodillas
pero es el alma la que grita
por los muertos
y los que van a morir

Los amigos, hijos, mujeres,
vidas perdidas, desperdiciadas
al viento, a barcos sin alas,
vidas perdidas para siempre
hijos no nacidos, nietos no mimados
mundos enteros, Abeles desconocidos
posibilidades que no serán

El dolor viene a ponerse en la cabeza
pero es el mundo el que grita
a través de nuestros cuerpos
cansados de tantas vidas inútiles.

La Douleur (Version française Sonia Soriano et Rosa Ramos)

La douleur vient aux genoux
mais c’est l’âme qui crie
pour les morts et pour ceux qui vont mourir.

Les amis, les enfants, les femmes,
vies perdues, gaspillées au vent,
à des bateaux sans ailes,
vies perdues pour toujours,
des enfants pas nés,
des petits-enfants pas chéris,
des mondes entiers,
des Abels inconnus,
possibilités qui n’existeront pas.

La douleur s’introduit dans la tête
mais c’est le monde qui crie
à travers nos corps
fatigués de tant de vies inutiles.

Muletas (Original Mois Benarroch)

Os dejo, os dejo marineros de la mancha
en mares negros, os dejo y me voy
no me tiren salvavidas sé muy bien
andar sobre estas aguas
no necesito vuestra ayuda
ni hipotecas futuras
las olas me bastan para andar
el olor de naranjas me llevan a mi tierra
y soy más libre que la libertad que podéis imaginar
más fuerte que toda la ayuda que intentáis darme
para que ande sobre muletas
para después decir que no sé nadar
ni siquiera andar sobre el asfalto
sobre el césped húmedo de la mañana

Eso es, por fin, me voy
que quede claro
no voy a volver.
Nunca.

Des Béquilles (Version française Sonia Soriano et Rosa Ramos)

Je vous laisse, je vous laisse marins de la manche
en mers noires, je vous laisse et je m’en vais
ne me jetez pas de bouées de sauvetage
je sais très bien marcher sur ces eaux
je n’ai besoin de votre aide
ni d’avenirs hypothéqués
les vagues me suffisent pour marcher
l’odeur des oranges m’amène vers ma terre
et je suis plus libre, que toute la liberté que vous pouvez imaginer
plus fort que toute l’aide que vous essayez de me donner
pour que je marche sur mes béquilles
pour après pouvoir dire que je ne peux pas marcher
même pas marcher sur le bitume
sur le gazon humide du matin.

C’est ça, en fin, je pars
que ce soit clair
je ne reviendrais pas.
Jamais.